Le prix Nobel de la paix s’est ainsi exprimé, mercredi 18 septembre 2019, au lancement de la première édition du forum panafricain pour une culture de la paix en Afrique dans la capitale angolaise. Dr. Dénis Mukwege qualifie la culture de corruption et d’impunité de deux cancers qu’il faut stopper, pour basculer vers une culture de transparence et de redevabilité.
La première édition de la biennale de la paix de Luanda, forum panafricain sur la culture de la paix en Afrique a lieu du 28 au 22 septembre avec la participation de 12 pays.
Ce forum vise à engager les pays africains dans une chaîne destinée à promouvoir une culture de paix, d’harmonie et de fraternité entre les peuples par le biais d’activités et de manifestations culturelles et civiques.
Prenant la parole, Dr. Dénis Mukwege se réjouit de parler de la culture de la paix, un thème qui le tient à Cœur. Pour construire cette paix, l’Afrique a avant besoin de puiser dans ses ressources culturelles et humaines et d’adapter ses valeurs à ses origines pour se réapproprier une véritable identité, et enfin permettre le développement humain, social et économique du continent et de ses peuples. Il est convaincu que pour apporter des réponses africaines aux transformations qui affectent l’économie et la société, l’espoir deviendra une réalité tangible lorsque les dirigeants de ce continent et ses élites se feront soigner et mourront sur la terre de leurs ancêtres. Cela, plutôt que dans des hôpitaux occidentaux, et enverront leurs enfants dans des écoles et des universités du continent plutôt qu’à Paris ou à Lisbonne. « Il est temps de passer d’une culture de corruption et d’impunité, les deux cancers de l’Afrique, vers une culture de transparence et de redevabilité », relève-t-il.
Vivement l’utilisation de ses potentiels
A l’en croire, l’Afrique a les moyens humains et matériels. « Tout est question de volonté politique. Ne cédons pas à l’afro-pessimisme », rassure-t-il. Car, une bonne gouvernance démocratique et économique des ressources tant naturelles qu’intellectuelles permettrait aisément d’offrir aux sociétés un développement endogène garantissant la satisfaction des besoins pour tous. Selon ce schéma, les migrations passeront d’une dynamique centrifuge vers l’Europe qui s’accompagne du drame de l’exil des cerveaux et des forces vives à une force centripète qui soutiendra le développement du continent.
Pour le réparateur des femmes, il est temps de réaffirmer les valeurs de solidarité et de fraternité africaine. Si la géopolitique globale a souvent contribué à l’instabilité de l’Afrique à l’instar de la situation au Sahel et au Sud Soudan, d’autres foyers de violences et de pillages sont transfrontaliers et ont une dimension régionale, comme à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC). « La paix ne se construit pas sur des fosses communes », dit-il, convaincu qu’il n’y aura pas de paix durable sans justice. Il appelle les chefs d’Etats présents à cette rencontre, l’Union Africaine (UA), l’ONU et la société civile à soutenir la mise en œuvre des recommandations du Rapport Mapping du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits de l’Homme sur les graves violations des droits humains et du droit international humanitaire commises entre 1993 et 2003 en RDC, publié il y a presque 10 ans. Ce qui constitue une cartographie de 617 crimes internationaux.
Il recommande de recourir à des mécanismes de la justice transitionnelle, tels que l’établissement d’un tribunal pénal international ou de chambres spécialisées mixtes, une commission de la vérité, des programmes de réparation et des garanties de non-répétition. Ce qui contribuera à réaffirmer les valeurs africaines de solidarité et de fraternité et à consolider la paix et la stabilité au cœur de notre grand continent, qui continue de saigner tous les jours.
Quid de la biennal de Luanda ?
La première édition de la biennale de la paix de Luanda s’inscrit dans la stratégie opérationnelle de l’Unesco pour la priorité Afrique (2014-2021) qui vise à apporter des réponses africaines aux transformations qui affectent leurs économies et leurs sociétés. Une rencontre qui s’articule autour de trois axes à savoir, le forum des partenaires ; forum d’idées/forum des jeunes/forum des femmes ; un festival des cultures.
La biennale bénéficie également du soutien de l’Union Africaine, qui reçoit des informations sur l’évènement lors du prochain sommet des Chefs d’Etat et de gouvernent tenu à Addis-Abeba, capitale éthiopienne.
Judith Asina
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