Muhindo Nzangi

Le ministère de l’ESU : d’incohérences en incohérences (Tribune)

Il est acquis que l’Enseignement Supérieur et Universitaire  appelle de profondes réformes dans le dessein d’en redorer la qualité. Encore faut-il que les mesures y afférentes soient prises après mûre réflexion, donc après une étude de faisabilité. En clair, les réformes ne doivent nullement être enclenchées avec précipitation. En outre, elles doivent bénéficier de mesures d’encadrement en vue d’en assurer la factibilité en temps réel.

Or, à quel spectacle est-on convié ?

  1. Sans tambours ni trompettes, l’UPC est signifiée de mettre un terme à sa filière /3ème Le Conseil d’Etat, saisi, a recadré le Ministre de tutelle.
  2. Les rétro-commissions des frais de missions et autres quotités, pourtant bannies par la Primature ILUNGA ILUNKAMBA ont refait surface comme par enchantement. Le Ministre a fait publier une note circulaire dans ce sens, demandant même aux missionnaires envoyés aux universités de reverser au cabinet du Ministre 10% de frais de mission perçu et payé par les universités.
  3. L’Ordre des Médecins s’est vu habilité à évaluer la viabilité des universités, au mépris des instructions émises hier encore par l’ancien Ministre de l’ESU, Thomas Luhaka.
  4. Sans parler du contrôle à posteriori effectué à l’Université de Mbuji-Mayi, un régionalisme rampant énerve l’objectivité des critères de viabilité des universités en RDC. Le constat est flagrant : 44% des institutions retenues sont issues dans le Grand Kivu, région d’origine du Ministre.
  5. Pour l’organisation des Etats-Généraux de l’ESU, le Ministre MUHINDO a demandé, par note officielle, aux établissements universitaires de contribuer jusqu’à hauteur de 20.000 $ par établissement. Le montant devait être versé, non au Trésor Public, mais dans des comptes spécifiés par ses soins. Alors qu’en principe, les frais d’organisation de ces Etats-Généraux sont à charge du Trésor Public. Il serait fondé d’émettre des soupçons quant à la destination dernière de ces contributions. Il ne serait pas étonnant que l’IGF se saisisse de ce dossier.

Par-dessus le marché, les conséquences pénibles touchant les futurs médecins (vivant à présent au gré des aléas et comme en apesanteur) sont examinées avec une légèreté qui laisse pantois.

Quid des frais académiques (à divers montants), des structures d’accueil pouvant absorber tout ce monde, du rapport professeur/nombre d’étudiants ? Que dire de ce plan de réinsertion, x fois évoqué en toute opacité, lequel régulerait ce qui confine à des travaux d’Hercule ? Par-delà ces effets d’annonce, la question qui taraude plus d’un est, en l’occurrence, la suivante : ledit plan est-il budgétisé ?

Pour illustrer l’improvisation caractérisée du Ministre MUHINDO l’on apprend des sources proches de son cabinet que les 2 universités retenues dans la ville de Kinshasa pour organiser la Faculté de Médecine (UNIKIN et UPC) étant dans l’impossibilité, en termes de capacité d’accueil, de recaser des étudiants, le Ministre projette de se rabattre sur deux universités auparavant estampillées non viables pour organiser la Faculté de Médecine : les Universités William Booth et Simon Kimbangu. Que dire, dès lors, du reste du pays ?

Tant et si bien que, d’incohérences en incohérences, il est à craindre que cela nuise à l’action gouvernementale. A tout le moins, il sied de s’inquiéter pour les millions de congolais qui seront désarçonnés par la brutalité de la mesure.

En tout état de cause, l’affaire semble prendre une tournure politique. En effet, un député est d’ores et déjà, monté aux créneaux : l’affaire est pendante au Conseil d’Etat.

Quoi qu’il en soit, la dimension politique du dossier pourrait, à y regarder de près, amener le Chef de l’Etat à solliciter, auprès du regroupement politique dont le Ministre MUHINDO est issu,  un représentant moins primesautier (en d’autres mots qui agit avec réflexion préalable), davantage à l’écoute, respectueux des efforts et sacrifices consentis par les privés, et sensible à leur volonté réaffirmée de parfaire au mieux leur œuvre humaine.

Au final, si la qualité de l’enseignement est l’objectif de tout le monde, le mode opératoire des réformes n’en doit pas moins être pensé et non brusqué. Les paramètres spécifiques à notre pays doivent être impérativement pris en compte (Etat-continent, démographie galopante, déclin des professeurs qualifiés, durée de formation de la relève pour un atterrissage en douceur, en lieu et place du crash en perspective.

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